Malgré la prospérité croissante au niveau mondial, l’écart entre les plus riches et plus pauvres continue de se creuser. En France, 9 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, dont près de 3 millions dans une situation de privation matérielle grave. La pauvreté est multidimensionnelle. Aux privations, s’ajoutent la dépossession du pouvoir d’agir et le manque de contrôle de sa vie, à défaut de pouvoir accéder à ses droits. Les inégalités sont particulièrement prégnantes en outre-mer, en matière d’accès à l’éducation, à l’emploi, à la formation et à la santé.
Cette inégalité menace la cohésion sociale, au même titre que les inégalités de revenu, entre les sexes, en lien avec l’âge, le handicap, l’origine sociale ou ethnique ou encore l’appartenance religieuse. Or, l’adhésion à un projet commun de transformation durable de notre société exige que chacun soit partie prenante de la transformation, et dispose pour cela des mêmes droits, opportunités et libertés que ses concitoyens. Elle exige également un engagement de tous les acteurs et une impulsion forte de l’État.
Transition écologique et lutte contre la pauvreté sont indissociables. Les personnes pauvres en France, comme à l’échelle mondiale, sont proportionnellement les moins responsables du changement climatique et les plus lourdement touchées par ses conséquences. Elles sont également les plus impactées par les mesures de transition. Celles-ci seront élaborées en concertation avec elles en tenant compte de leur situation et de façon à ne pas aggraver la pauvreté et les inégalités, et à offrir de nouvelles opportunités. Une proportion croissante de la population est ainsi concernée par des inégalités écologiques, et la France doit agir pour une transition juste en s’appuyant sur l’élaboration et la définition d’étapes et de scénarii désirables par la population.
La France agit ainsi pour réduire les inégalités et lutter contre toute forme d’exclusion. La stratégie nationale de prévention et de la lutte contre la pauvreté, d’une dotation annoncée de 8,5 milliards d’euros, a été élaborée en 2018 par les pouvoirs publics associant étroitement les collectivités locales, à l’issue d’importants débats citoyens. Au-delà de ses frontières, la France inscrit son action dans le cadre des principes du Socle européen des droits sociaux, et se mobilise à l’international dans la lutte contre les discriminations et les violations des droits humains. Elle inscrit son action internationale dans le cadre de la stratégie « Droits humains et développement » et opte pour un développement fondé sur les droits humains. Le Conseil de l’Europe engage également un certain nombre d’actions pour les droits de l’homme et intègre les ODD dans ses rapports.
Pour soutenir ces actions, il est nécessaire de réaffirmer le socle du pacte social autour des valeurs de notre République et de se donner les moyens d’inclure chaque habitant(e) et chaque territoire, dans la transition vers une société juste et durable.
Priorité 1.1 : Ne laisser personne de côté, et assurer l’accès aux droits fondamentaux et services essentiels à chacun
Ne laisser personne de côté, c’est considérer chaque personne comme titulaire de devoirs et de droits, et permettre un accès égalitaire à ces derniers. C’est lutter contre le non recours aux droits par l’information, l’accompagnement ou l’attribution systématiques des droits. C’est aussi s’engager dans la lutte contre les discriminations pour une gestion des migrations respectueuse des droits de l’homme et de la solidarité internationale. C’est également garantir la redevabilité de l’État envers les citoyens. Ne laisser personne de côté, c’est enfin considérer la diversité des territoires nationaux, en métropole et en outre-mer et assurer et renforcer la cohésion sociale et intergénérationnelle.
Une recherche internationale menée durant trois ans dans six pays par ATD Quart Monde et l’Université d’Oxford avec la contribution de centaines de personnes vivant en situation de pauvreté, de professionnels et de chercheurs, suivant la méthode du croisement des savoirs, a mis en évidence les interactions entre dimensions de la pauvreté dont certaines cachées car non prises en compte par la société alors qu’elles sont au cœur de l’expérience de vie commune aux plus pauvres, comme la dépossession du pouvoir d’agir qui engendre une profonde souffrance, mais aussi le combat et la résistance, la maltraitance sociale (préjugés, stigmatisation), la maltraitance institutionnelle (humiliation, dépendance, violence subie), la non reconnaissance des compétences et savoirs individuels et collectifs. Il s’agit désormais de renforcer les critères actuels d’évaluation de la pauvreté, pour imaginer et co-construire avec les personnes vivant en situation de pauvreté, en se fondant sur leurs connaissances et leurs aspirations, des mesures et programmes innovants visant à ne laisser personne de côté et à éradiquer la grande pauvreté.
Priorité 1.2 : Faire de la lutte contre les discriminations, notamment femmes/hommes, une priorité des sphères publiques et privées
Lutter contre les discriminations doit passer par un renforcement des moyens des acteurs qui agissent au quotidien, sur le terrain. L’État, les représentants des entreprises et le monde associatif s’engagent à renforcer les dispositifs en faveur de la lutte contre les discriminations.
La Charte nationale de l’accès au droit
Elle a été signée en 2017 par le Ministère de la justice et les associations Droits d’urgence, Les Restaurants du cœur, le Secours catholique, la Fondation Abbé Pierre, ATD Quart Monde, la Cimade et le RENADEM. Elle définit les valeurs, les objectifs communs, les principes fondamentaux, le périmètre d’intervention, les modalités de mise en œuvre et de fonctionnement permettant l’accès au droit et l’accompagnement des personnes les plus démunies.
Priorité 1.3 : Assurer une meilleure répartition des richesses, et systématiser la prise en compte des enjeux de pauvreté dans les politiques publiques, au service d’une transition juste
La création de richesse doit servir l’intérêt général, et pour cela trois conditions apparaissent comme indispensables : l’acceptation du système d’imposition ; la promotion d’une diversité des modèles économiques, en particulier ceux permettant d’organiser de façon transparente le partage des richesses ; et une attention prioritaire aux citoyens et territoires les plus pauvres. L’État, en lien avec le monde économique dans sa diversité, vise également la lutte contre les inégalités écologiques :