Pour le sociologue Loïc Blondiaux : « Alors que la légitimité de la représentation politique s’affaiblit de plus en plus du fait d’une perte de confiance simultanée entre peuple et représentants, un nouvel esprit de la démocratie émerge : la démocratie participative… » [1] . Cette démocratie participative se développe peu à peu dans les pays européens. Certains dispositifs participatifs sont de plus en plus utilisés, comme le droit de pétition et l’usage du référendum, notamment en Autriche et en Suisse [2]. Le référendum existe dans la plupart des pays européens, excepté en Belgique et en Allemagne.
Au niveau de l’Union européenne (UE), un dialogue a été installé entre ses institutions, le patronat et les syndicats. C’est ainsi que le Conseil économique et social européen (composé des collèges consommateurs, salariés et patronat) est l’une des deux institutions consultées par la Commission pour les projets législatifs [3]. Avec le traité de Lisbonne, le dialogue avec les citoyens de l’UE a évolué. Deux dispositifs ont été créés : les pétitions [4] au Parlement européen et l’initiative citoyenne européenne (ICE) [5].
Avec la multiplication des enjeux autour de la transition énergétique et ceux de la sortie de la pandémie de la Covid-19, les gouvernements des États occidentaux souhaitent engager des réformes structurelles, telles que la transition écologique et le passage vers un monde décarboné, en demeurant à l’écoute des citoyens. Dans de nombreuses villes et territoires du monde (Londres, Gdansk, Communauté de l’Ostbelgien…) des assemblées, conférences et autres conventions citoyennes, se sont développées à l’échelle locale ou nationale [6]. Dans certains cas, comme en France et au Chili, ces conventions ou assemblées citoyennes ont dans un premier temps permis une sortie de crise, puis de préparer les populations aux grands choix de l’avenir, en les associant, via un processus délibératif. La crise des gilets jaunes en France, comme les émeutes de la faim à Santiago ont mis en évidence la nécessaire acceptabilité sociale des mesures et des politiques que les États engagent.
La recherche de solutions acceptables, notamment face à la crise écologique, a redonné du souffle à des démarches participatives utilisées depuis longtemps. Une grande partie d’entre elles procède de l’esprit de la convention d’Aarhus [7] (la France a ratifié la Convention d’Aarhus le 8 juillet 2002.). Un rapport récent de l’OCDE propose 12 modèles de processus délibératif différents [8] issus de quelques 282 cas de démarches participatives recensés entre 1986 et 2019. La majorité des organisateurs sont des autorités publiques locales (52 %), avant les régions et les États fédérés (30 %) et loin devant les États centraux ou fédéraux (15 %) [9]. En Europe, ce sont les petits États qui se sont engagés les premiers dans ces initiatives de renouveau démocratique comme l’a fait l’Islande au début des années 2010 pour réviser sa constitution [10].
Sur les territoires, ce sont les collectivités territoriales, selon leurs compétences, qui peuvent orienter, avec leur population, la cohérence de leur développement économique avec l’amélioration de la cohésion sociale et la protection de l’environnement. Elles organisent le territoire de manière à ce qu’il puisse offrir à tous des opportunités d’emploi, un accès aux services de base, au logement, aux transports, aux espaces publics verts… tout en rationalisant l’utilisation des ressources, en protégeant les biens communs, et en réduisant leurs impacts environnementaux. Les territoires sont également le creuset de l’action de proximité et de l’émergence de solidarités locales souvent doublée d’innovations sociales.
D’après une étude menée par Energy Cities sur un panel d’une vingtaine de pays du monde [11] dont la France, dans les territoires urbains et ruraux, des citoyens, considérant que les institutions ne parviennent plus à répondre à leurs attentes, décident de se saisir eux-mêmes des questions de solidarité, de qualité de vie, de préservation de la biodiversité... Ainsi, ils s’impliquent directement dans la vie locale, par le biais d’initiatives citoyennes. Ces dynamiques regroupent, cependant, des motivations et des ampleurs différentes. On peut néanmoins distinguer [12] : les actions ponctuelles qui visent le plus souvent à faire pression sur les institutions pour les inciter à prendre des décisions en faveur d’une cause ou d’un projet précis ; les projets citoyens qui permettent aux individus de porter eux- mêmes un projet particulier en proposant ainsi des alternatives aux solutions traditionnelles ; les mouvements citoyens qui visent à réclamer plus de justice sociale et climatique en rassemblant les individus autour de projets communs ; et enfin la désobéissance civile où les personnes sont prêtes à désobéir à la loi, estimant que certains projets légaux ne sont pas légitimes.