Olivier Richard, ministre conseiller et chef du pôle enjeux globaux (1er rang à droite) et Alain Verninas, conseiller enjeux globaux (à gauche)
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« Nous nous retrouvons à mi-parcours de la mise en œuvre de l’Agenda 2030 dans une situation bien plus défavorable que nous ne l’aurions espéré en 2015. Les crises multiples et interconnectées que nous traversons depuis trois ans remettent en cause notre capacité à réaliser les objectifs de développement durable.
La multiplication et l’intensification des conflits est à ce titre particulièrement préoccupante : nous le réaffirmons encore une fois, il ne saurait y avoir de développement durable sans paix, ni de paix sans développement durable.
Bien que le chemin à parcourir reste considérable, nous ne devons céder ni au fatalisme, ni à la résignation. Les experts s’accordent sur le fait qu’il n’est pas trop tard pour inverser la tendance. Si nous nous en donnons les moyens, nous pouvons encore réaliser notre ambition d’un monde plus juste, plus durable, plus résilient et qui ne laisse personne de côté.
Dans cette situation, l’Agenda 2030 doit rester notre boussole commune. Au-delà des déclarations d’intention, nous devons proposer de manière urgente des solutions concrètes pour sortir de cette crise sans fin et accélérer l’atteinte des objectifs de développement durable.
A ce titre, nous apportons notre plein soutien au Secrétaire général des Nations unies dans sa volonté de faire du Sommet ODD un sommet de la mise en œuvre, reposant sur des engagements concrets et à la temporalité clairement définie.
Nous devons à ce titre tirer parti des multiples initiatives multilatérales et solidaires qui ont émergé, et nous assurer que les grandes échéances à venir – à New Dehli, à Nairobi, à Marrakech, à Abu-Dhabi – débouchent sur des résultats tangibles et ne soient pas autant d’occasions manquées.
Face au risque d’une fracture mondiale irrémédiable, la question du financement du développement durable est plus cruciale que jamais. La tenue à Paris du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial a permis de mettre sur la table des solutions neuves et ambitieuses.
L’Agenda de Paris pour les peuples et la planète qui y a été adopté énonce des principes importants qui doivent guider notre action. Conformément à l’esprit de l’Agenda 2030, nous devons délivrer un choc de financement public et privé et renforcer notre architecture financière internationale afin qu’aucun pays n’ait à choisir entre la lutte contre la pauvreté et la préservation de la planète. Il est désormais de notre responsabilité de s’assurer que ces efforts se traduisent par des avancées concrètes dans les prochains mois.
La France reste pleinement engagée pour un monde sobre en carbone, résilient, respectueux de la biodiversité, juste et protecteur envers les plus vulnérables. En œuvrant avec détermination et ambition à la réalisation de l’Agenda 2030, nous pouvons en faire une réalité tangible pour tous. »
Le 10 juillet de 15h à 16h30
Financer notre réponse aux crises et investir dans les ODD
Comment le Sommet des ODD peut-il s’appuyer sur les recommandations du Forum de l’ECOSOC ?
Que pouvons-nous réaliser lors du sommet sur les ODD et du dialogue de l’AG sur le FfD en septembre 2023 ?
Intervention de la représentation française Alain Verninas - Conseiller enjeux globaux
« Alors que nous nous trouvons à mi-parcours de la mise en œuvre de l’Agenda 2030, le déficit de financement des objectifs de développement durable est plus criant que jamais. Face aux conséquences des crises en cours sur les populations les plus vulnérables et les plus marginalisées, ainsi que la dégradation continue de notre planète, les besoins sont immenses.
Nos biens publics mondiaux ne peuvent s’accommoder d’un monde à deux vitesses, où les pays qui concentrent l’essentiel des vulnérabilités ne disposent pas des moyens financiers pour y faire face. Sans solutions pérennes, nous courrons le risque d’une fracture mondiale irrémédiable.
L’aide publique au développement demeure, à ce titre, essentielle, notamment pour financer certains investissements nécessaires dans les infrastructures et les services de base. La France prend sa juste part dans cet effort puisqu’elle y a consacré l’année dernière un montant record de près de 17 milliards de dollars, soit 0,56% du revenu national brut.
Toutefois, face à l’ampleur des défis auxquels nous faisons face, les ressources publiques des bailleurs sont insuffisantes. Dans ce contexte, le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, organisé à Paris à l’initiative du Président de la République Emmanuel Macron et de la Première ministre de la Barbade Mia Mottley, a permis de mettre sur la tables des solutions neuves et ambitieuses pour créer les conditions d’un choc de financement pour les ODD.
Notre système financier international a été fondé il y a près de quatre-vingts ans et n’est plus adapté à notre réalité contemporaine. Nous devons mener à bien la réforme des banques multilatérales de développement, qui passera par une optimisation de leurs moyens opérationnels et financiers et par une utilisation plus efficace des financements concessionnels.
Nous avons atteint l’objectif de 100 milliards de dollars de droits de tirage spéciaux réalloués aux pays les plus vulnérables : nous devons continuer dans cette direction et susciter des engagements supplémentaires.
Afin de maximiser l’impact de notre action, nous devons mieux mobiliser le secteur privé, en favorisant l’alignement des flux financiers sur les ODD, et en renforçant le caractère catalytique de tous les financements publics.
Nous devons enfin collectivement réfléchir au déploiement d’outils novateurs, par exemple la mobilisation de ressources additionnelles par la taxation de certains flux nocifs, le déploiement de clauses de suspension de dette en cas d’événements climatiques, ou la mise en place de mécanismes de rémunération des services écosystémiques.
Les mois à venir présentent une fenêtre d’opportunité, peut-être unique, avec des échéances majeures dans diverses instances qui sont autant d’occasion d’inverser la tendance. Le Sommet de Paris nous a permis d’observer que la volonté existe. Notre engagement doit désormais aboutir sur des avancées concrètes, si nous voulons nous donner les moyens d’atteindre notre ambition d’un monde plus juste, plus durable et plus résilient d’ici à 2030. »
Le 10 juillet - 16h30 – 18h
Science, technologie et innovation : Déclencher la transformation et soutenir une reprise fondée sur la science
Messages clés du Rapport mondial sur le développement durable 2023. Tirer les enseignements du forum STI, promouvoir les partenariats sur la STI pour la transformation en vue des ODD
Intervention : Institut de recherche pour le développement (IRD)
Gilles Pécassou - Directeur général délégué de l’IRD
« Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs,
C’est un constat scientifique, celui des experts du GIEC, qui a permis d’enclencher une réponse internationale face au changement climatique.
Il est crucial que les efforts d’adaptation à ces évolutions, dans les champs politiques, technologiques, de l’innovation, reposent sur des bases scientifiques solides.
L’accélération de ces changements et leurs effets dramatiques poussent aujourd’hui les scientifiques à sortir de l’ombre relative de la production de connaissances et à s’engager davantage dans la proposition de solutions à destination des décideurs, des bailleurs, des citoyens.
La mise en œuvre des Objectifs de développement durable (ODD) constitue la boussole des acteurs du monde de la recherche et du développement au Nord comme au Sud.
Institution française publique de recherche, l’IRD est pleinement engagé depuis 2015 pour l’atteinte des ODD, de leurs 169 cibles et des indicateurs associés.
L’agenda 2030 nous a cependant convaincus qu’il fallait aller au-delà et revoir aussi l’approche scientifique classique. Nous avons réorganisé nos activités autour de 9 grands défis sociétaux, rompant ainsi avec les clivages disciplinaires/approches en silos traditionnelles.
En parallèle, l’IRD a engagé un profond changement de paradigme interne en construisant et en soutenant l’émergence de plateformes d’intelligence collective – Les Communautés de savoirs - impliquant chercheurs et ingénieurs du monde de la recherche et du développement, afin de faire converger leurs connaissances, savoir-faire, savoir-être, pour la résolution de problèmes concrets, sur le terrain.
Au cœur de notre stratégie scientifique, la science de la durabilité et ses 4 principes cardinaux :
- Une forte interdisciplinarité, entre sciences de l’environnement, sciences humaines et sociales, savoirs locaux, et champs alternatifs tels que les arts (la photographie, le dessin, l’écriture, la danse, le théâtre) permettant d’intégrer d’autres manières d’appréhender le monde.
- Une co-construction multi-acteurs des projets de recherche, impliquant le monde académique et un large panel de parties prenantes afin de faire émerger des problématiques transdisciplinaires en lien avec les besoins des sociétés.
- Une approche globale-locale qui considère l’impact des solutions à différentes échelles
- Une recherche partenariale, « insérée » dans les écosystèmes d’enseignement supérieur et de recherches de nos pays partenaires
L’IRD continuera à porter son modèle, fondé sur le principe de partenariat équitable* et sur une science co-conçue et co-construite avec ses partenaires ; car nous nous sommes convaincus qu’il est le seul à pouvoir répondre efficacement aux problèmes complexes et interconnectés qui se posent à nous.
Ce modèle nous ne le portons pas seuls et c’est le sens de « l’alliance de la recherche européenne pour le développement » que nous allons faire émerger entre organismes européens de recherche pour le développement.
Je vous remercie »
Interview de Gilles Pécassou