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Publié le 16 février 2022
En France
En France, plus de 60% des zones humides en métropole ont disparu depuis le début du XXe siècle, dont la moitié entre 1960 et 1990. En raison de leur rôle dans l’atténuation des phénomènes liés au changement climatique, et par la demande croissante en eau, la protection des zones humides est devenue une priorité. Comment la Convention RAMSAR (traité international) organise la protection de ces zones humides ? A l’occasion de la journée mondiale des zones humides (2 février), interview de Flore Lafaye de Micheaux, cheffe de délégation RAMSAR au ministère de la Transition écologique.
Les milieux humides sont parmi les écosystèmes les plus importants de la planète. Il s’agit de la zone d’interface entre le milieu terrestre et le milieu aquatique. Continentales, ce sont les marais, tourbières, prairies humides, roselières, et forêts alluviales. Littorales ; elles rassemblent les zones estuariennes, les lagunes, les prés-salés… Les zones humides ont subi des dégradations ou des destructions pour répondre aux besoins de la société. L’urbanisation, les drainages agricoles, ou les recalibrages de rivières sont autant de menaces pesant sur ces zones fragiles, essentiel pour l’équilibre et le bon fonctionnement des écosystèmes.
Les zones humides ont trois fonctions principales. La fonction de « château d’eau », puisqu’elles peuvent stocker l’eau (en surface et dans le sol) et la restituer progressivement. Ce sont des régulateurs naturels de flux d’eau en période d’inondation et de sécheresse. Les zones humides sont également considérées comme des « réservoirs de biodiversité » puisque près de 30% des espèces végétales rares et menacées y vivent, et environ 50% des oiseaux seraient dépendants de ces milieux. Enfin, elles jouent un rôle d’épuration en filtrant et transformant certains polluants issus des activités humaines, et contribuent au stockage du carbone dans le sol. Les zones humides permettent une gestion de la ressource en eau (réserves d’eau douce pour la consommation, zones d’expansion de crues...). Par leurs fonctions de corridors et de refuges, elles ont un rôle dans la conservation de la biodiversité. Milieux riches et productifs, elles sont le support de diverses activités économiques : agriculture, sylviculture, ostréiculture… Elles jouent également un rôle non négligeable dans le développement socio-culturel d’un territoire puisque, formant des paysages singuliers, elles sont des espaces de tourisme et de loisirs.
La convention RAMSAR est le plus ancien traité international relatif à la protection de l’environnement, adoptée le 2 février 1971 dans la ville de Ramsar en Iran. La Convention compte aujourd’hui 172 parties contractantes. Elle vise la préservation des zones humides, milieux parmi les plus menacés au monde. Les zones humides sont reconnues à l’échelle internationale en raison de leurs fonctions et valeurs écologiques, économiques, scientifiques, culturelles et récréatives.
La 59e session du Comité Permanent a débuté en juin 2021, et poursuivra ses travaux du 23 au 27 mai 2022 en Suisse, au siège de la Convention. Cette session est décisive pour préparer la Conférence des Parties, en novembre 2022 lors de la COP en Chine, à Wuhan. Le Comité Permanent aura notamment pour mandat d’examiner les résolutions qui seront adoptées - ou non- en novembre. Le Comité Permanent comprend un nombre restreint de parties contractantes, mais toutes les parties sont invitées à s’y exprimer.
La conduite d’une délégation nationale assure la coordination des positions françaises. Cette coordination inclut la consultation et l’association d’experts français, issus des ministères et de la société civile. L’équipe rapprochée est composée de collègues de la Direction de l’eau et de la biodiversité, de l’Office français de la biodiversité et du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.
Dans le contexte de la présidence française du Conseil Européen, je coordonne les positions européennes et facilite l’émergence de positions communes au sein de la région Europe de la Convention Ramsa, qui rassemble 48 pays. D’expérience, lorsque la région Europe parle d’une seule voix, elle est écoutée et influente dans les travaux de la Commission. Il s’agit de mener à la fois un travail d’écoute des partenaires, et un travail de conviction lors du pilotage des négociations, pour donner envie de dépasser les divergences pour faire progresser les points les plus importants à défendre.
Le point central de cette session est à mes yeux les débats autour des réformes d’organisation et de gouvernance de la Convention. Nous espérons des mesures à la fois ambitieuses et réalistes pour rendre la Convention plus agile et efficace. Nous souhaitons aussi progresser sur la mise en valeur du récent label ’Villes Ramsar’ qui présente l’intérêt d’attirer l’attention sur la nécessaire préservation des zones humides en milieu urbanisé ou péri-urbain.
Une autre résolution en discussion concernera les petites zones humides. La convention a jusque-là privilégié les grandes zones humides, à travers son réseau mondial de 2435 sites d’importance internationale, labellisés Ramsar. La France en compte 52, dont 12 en Outre-mer, soit 3,6 millions d’hectares concernés.
L’IPBES, la plateforme inter-gouvernementale pour la biodiversité et les services écosystémiques, a établi que le premier facteur direct de déclin des zones humides était le changement d’usage des sols, plus de la moitié des zones humides étant dégradées par l’agriculture. Elle rend compte de l’impact du changement climatique sur les zones humides, dont les effets sont très rapides.
En France, l’évaluation nationale des milieux humides emblématiques a fait apparaître que plus de 40% des sites présentent des milieux en dégradation entre 2010 et 2020. Les prairies humides sont particulièrement menacées.
La Convention fêtera ses 50 ans à la COP de Wuhan. Et 2022 verra l’adoption du Cadre mondial de la biodiversité pour l’après 2020. Ce cadre représentera une avancée considérable pour la prise en compte de la biodiversité.
Enfin, un des grands objectifs de l’année 2022 est d’obtenir qu’à travers une meilleure articulation de la Convention Ramsar avec l’ensemble des travaux internationaux sur le climat, la biodiversité et le développement durable, les zones humides reçoivent une attention renouvelée des politiques publiques aux niveaux local, national et international.
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